Voulant écraser toute concurrence en s’appropriant un personnage qui est cher pour beaucoup de joueurs, Spider-Man n’a pas résisté longtemps avant d’être pris sous la tutelle du géant Sony. De ce fait, je me rappelle encore de la joie que m’avait procuré Spider-Man 2 sur PS2 à l’époque où les mondes ouverts se faisaient discret de par l’incroyable charge de travail et les ressources qu’ils demandaient. C’est alors qu’il est arrivé… Ce temps où les expérimentations en monde ouvert ne sont plus. Ce temps où les développeurs puisent ailleurs et tirent sur la corde jusqu’à que celle-ci cède. C’est donc avec une certaine crainte et ce goût amer en bouche que je lançai pour la première fois le Spider-Man d’Insomniac priant pour qu’il ne s’ajoute pas à la longue liste des clones de Batman.
Tu n’es pas Superman mais Spider-Man
Annoncé en 2016 (Oui… Déjà !) lors de la conférence E3 de Sony, Spider-Man avait créé la surprise générale au point de redonner l’envie à bon nombre de joueurs de replonger dans une adaptation vidéoludique de l’homme araignée. Pas besoin de vous rappeler que l’ombre de la chauve souris de Gotham plane sur toutes les adaptations de super-héros depuis que Rocksteady a révolutionné le genre en 2009. C’est à la toute fin de cet été que l’éditeur se décida de sortir cette bombe qu’est Batman : Arkham Asylum, jeu quasi-parfait respectant à la lettre l’univers de Bob Kane et Bill Finger tout en apportant un univers gothique où la violence règne. Depuis dix ans, le système de combat des Arkham a été “emprunté” à de nombreuses reprises au point d’en perdre l’âme d’un jeu. Vous savez… Cette âme qui vient caractériser l’identité d’une œuvre et qui fait qu’on se souvient d’elle.
C’est ce que j’avais reproché aux The Amazing Spider-Man qui n’apportaient finalement que trop peu de nouveautés voire d’identité pour notre cher Spidey. J’avais donc pris mon mal en patience et engrangé tout au fond de moi une forme d’espoir qui venait régulièrement me dire qu’Insomniac pourrait avoir les épaules pour développer un univers solide, mais également une nouvelle approche pour Spider-Man. Si cette simple idée relevait de l’exploit voire de l’amazing, il m’était nécessaire de croire en ce projet qui me rappelait cette sensation de puissance et de liberté qui avait su me bercer par le passé.
Si les premières minutes nous plongent -in media res- dans le conflit Fisk-Spidey dès son introduction, le jeu prend quand même le temps de nous dévoiler l’ensemble des moves de l’araignée. Que dire si ce n’est que le titre est impeccable visuellement. Avec une réalisation de haute volée, Spider-Man se classe sans trop de mal comme le plus beau jeu de la licence. Il n’est que plus agréable de se balancer entre les nombreux buildings de Manhattan afin de gagner de la vitesse en l’air dans un jeu dont l’aspect graphique est quasi-irréprochable. Qu’il fasse jour, que les dernières lueurs du soleil se fondent sur les immeubles où bien que la nuit laisse place aux lumières de la ville amènent et prolongent l’immersion digne des films de Sam Raimi. En effet, il m’est arrivé à de nombreuses reprises de retrouver les sensations que m’avait laissées la trilogie du réalisateur américain au point de flâner en ville et ainsi profiter de l’impressionnante agilité de notre super-héros.
En parlant d’agilité, la gestuelle et la fluidité avec lesquelles Spidey se déplacent sont assez déconcertantes au point de mettre au placard vos anciens jeux favoris de l’homme araignée. Courir sur les murs, s’appuyer sur des rebords pour mieux rebondir dans les airs et tisser sa toile entre deux immenses tours n’a jamais été aussi agréable. Le tout se fait avec une simplicité ahurissante permettant ainsi aux joueurs les moins calés de s’approprier les mécaniques du titre. Étant très intuitif sur de nombreux aspects lors des promenades, il est certain que Insomniac a réalisé un travail monstre pour proposer une expérience simple et agréable. De plus, il est réjouissant de contrôler un Spider-Man parfaitement modélisé qui enchaîne les gestes techniques en l’air sur fond de blagues lycéennes sans jamais lasser le joueur.
Un grand pouvoir implique une grande histoire
Tout le monde connaît dorénavant les origines de notre super-héros. Nul besoin pour Insomniac de devoir rabâcher une énième fois comment Peter est devenu le héros qu’il est aujourd’hui. En effet, le studio part avec la volonté de proposer une nouvelle histoire complètement inédite qui vient puiser dans les différents comics du tisseur. Sans que cela soit une surprise, Spider-Man sera confronté aux manigances de Martin Li alias Mister Negative qui voudra à tout prix mettre fin au mandat de notre cher Norman Osborn alors maire de la ville. Pour mettre fin à ce capharnaüm qui vient déranger tous les habitants de Manhattan, Spidey devra se surpasser à l’aide de nouveaux gadgets et du soutien de Mary Jane, journaliste au Bugle ainsi que de Tante May qui bosse dans un refuge pour sans-abri. Vous l’aurez compris, Mister Negative, qui reste à ce jour peu connu du grand public, sert avant tout à lancer les aventures de Parker afin qu’il soit de nouveaux en difficulté face au Vautour, Scorpion, Electro ou encore le Rhino.
Sans trop en dévoiler il est étonnant de voir que le scénario de cette nouvelle adaptation prend quand même bien son temps pour faire sortir ces ennemis de l’ombre qui sont, il faut se le dire, plutôt sous-exploités. En effet, j’étais prêt à en découdre avec chacun d’eux, espérant que les différents affrontements permettent d’instaurer de nouvelles mécaniques de combats enrobés dans une mise en scène soignée. Tristesse quand je découvre que certains ennemis restent en paires quitte à être siamois à vie… Ce que j’espérais riche et original n’est en réalité que très(trop?) vite expédié afin de revenir sur une intrigue plus intimiste où Mister Negative restera l’un des principaux antagonistes. Légère déception donc dans les situations et affrontements qui peinent à créer un réel enjeu scénaristique laissant par la même occasion le joueur sur le carreau. Pour une meilleure construction et des situations épiques, il faudra revenir une autre fois…
Cependant, il est réjouissant de retrouver l’ambiance très “légère” et second degré de Peter pour désamorcer certaines situations qui auraient pu virer trop rapidement dans le pathos. Pour ce faire, il n’est pas obligatoire de switcher sur la version originale du titre puisque la version française est correcte grâce au travail de doublage de Donald Reignoux qui permet de rendre instantanément sympathique Spider-Man. Vous savez, c’est un peu le genre de type avec qui vous devenez ami sans même le connaître. Si le scénario tient la route, c’est avant tout grâce à certains dialogues croustillants que le titre tient en haleine le joueur. Il est donc appréciable de contrôler un jeune tisseur qui respire la vie.
Tu ne dois pas avoir honte de ce que tu es
Pour beaucoup, Spider-Man pourrait être le petit frère des Batman Arkham ou bien le voisin gentil qui essaie de reproduire tout ce qu’il fait. Qu’elle est mignonne l’araignée… Il serait regrettable de ne pas se pencher en profondeur sur le système de combat qui, avouons-le, ressemble quand même un tout petit peu au travail de Rocksteady. Certes, mais Spidey est beaucoup plus agile et reste, à la différence de Batman, un incroyable combattant qui virevolte partout. Au sol, sur les murs, mais aussi dans les airs, notre héros est partout. Là où le gameplay de Batman était lourd et très terre-à-terre, celui du tisseur est souple et permet aux joueurs d’aller où il le désire en un rien de temps. Avec des combos classiques pouvant se combiner avec des objets de l’environnement ou bien de vos attaques spéciales dignes de finish-moves, les mécaniques d’Insomniac sont solides et ne lassent jamais réellement.
En effet, nous pourrons débloquer de nombreuses aptitudes au fil de l’aventure puisque Peter gagnera des niveaux qui viendront l’endurcir lors de situations à priori inextricables. Votre toile sera d’une grande aide lors de ces affrontements pouvant laisser place à des spider-drones, des tissus électriques ou bien des projectiles qui collent immédiatement vos ennemis aux murs. Ainsi, en alternant avec la plupart des gadgets, mais aussi avec l’agilité de notre héros, Insomniac parvient à proposer des combats riches qui pourront à la longue paraître répétitifs au vu des situations qui se renouvellent bien peu… Dommage.
Si le tisseur est un expert du combat, il est également un homme de l’ombre. L’aventure vous fera alterner entre des affrontements classiques avec en complément des passages d’infiltrations et des énigmes. Si ces dernières sont anecdotiques quoi que sympathiques par moment, les phases où l’araignée devra rester dans l’obscurité sont quant à elle pompées sur d’autres jeux et noircissent le tableau. Il suffira de rester en hauteur, attirer l’attention d’un ennemi par un gadget et l’éliminer sans qu’un autre le remarque. Répétant ce même schéma pour chaque séquence d’infiltration sans jamais proposer quelque chose de nouveau, Insomniac se tire une balle dans le pied… Oubliant même d’inventer ou de trouver de nouvelles astuces pour apporter le mordant et l’efficacité qu’ont les combats.
C’est donc les fesses entre deux chaises que Parker rend une copie loin d’être parfaite… Lui qui nous avait pourtant habitués à être un si bon élève. Il est finalement décevant de voir la pauvreté des quêtes secondaires qui se font plus sur un coup de tête que par pure envie. Entre la chasse aux oiseaux, la partie de cache-cache avec Black Cat, les machines anti-pollution d’Harry Osborn ou bien les antennes radio de la police qui sont(comme par hasard !) déconnectés du réseau, Spider-Man ne fait pas vraiment plaisir aux fans de la série. Seuls les quelques monuments à photographier ainsi que les sacs à dos de Peter datant du lycée apportent un réel intérêt au jeu développant un background autour du passé de Peter.
Dis lui de ne pas ouvrir le caviar
Après avoir passé les passages positifs rapidement, il semblerait que ce Spider-Man m’ait ennuyé ou bien embêté au point d’en être rancunier. Rassurez-vous, j’ai apprécié ce nouvel opus… Plus que tous ceux sortis depuis Ultimate Spider-Man. Cela peut paraître sévère, voire inconscient de ne pas considérer Spider-Man Dimension comme une bonne adaptation-là ou ce dernier se contentait d’avoir des zones fermés, mais une excellente base technique. Non, le titre d’Insomniac est un bon jeu. Seulement bon. Quelque chose vient pourtant taper dans mon esprit à chaque fois que je parcours les rues de Manhattan, que je flâne et profite de cette ambiance légère ou le seul mot qui me vient à l’esprit est “liberté“… Ce quelque chose, c’est l’idée que certaines situations, scènes, quêtes secondaires ou bien mécaniques manquent pour parfaire un jeu bon qui aurait pu être excellent.
Spider-Man est un jeu solide à tous les niveaux, mais qui manque d’excitation, de folie. Certaines missions ou bien dialogues prouvent bien que le jeu recèle de fulgurances atteignant presque un éclair de génie… À plusieurs reprises le titre m’a enlevé cette idée que l’ombre de Batman n’était plus et ne parviendrait pas à revenir. Ceci par le biais de séquences mémorables, mais trop courtes qui viennent s’écrouler sous des missions secondaires inintéressantes, des baisses de rythmes ou bien la déception de voir un méchant réduit à un simple combat.
Participant à cette légère déception, les menus ainsi que les musiques me paraissent être les points noirs du jeu. S’insérant dans quelques séquences, les différentes ambiances sonores et les musiques ne m’ont pas transcendé au point de me sentir surpuissant dans les airs lors de mes petites promenades ou bien lors des combats. Tandis que les menus, labyrinthiques à souhaits, entassent les différentes catégories avec un trop-plein proche d’une indigestion. Des jetons qui se débloquent pour encore débloquer de nouveaux costumes afin de débloquer aussi de nouveaux gadgets… Malheureux de voir qu’Insomniac n’a trouvé que cette idée/excuse de jetons afin “d’obliger” les joueurs à accomplir les quêtes secondaires. Tristesse de devoir en arriver là pour cacher la platitude d’un monde ouvert qui peine à être excitant, vivant et cohérent. Voulant tout faire à la fois, Spider-Man casse peut être sa toile et délivre un monde ouvert impressionnant techniquement qui ne sait comment combler sa grandeur.
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Marvel’s Spider-Man est un jeu aux bases solides qui ne cesse de rappeler qu’il veut bien faire. Mettant toute la bienveillance du monde, Insomniac réussit en partie son pari de proposer la meilleure expérience possible du tisseur. Sans être désagréable, ce Spider-Man manque de peu le statut de grand jeu. Avec un budget considérable, Sony n’a pas lésiné sur les moyens et prouve que cette nouvelle adaptation pourrait laisser place à une toute nouvelle licence, qui espérons-le, saura rattraper ses lacunes. Pour le moment, Marvel’s Spider-Man reste un bon jeu, agréable qui dégage malheureusement des relents de déjà-vu. Allez ! La prochaine fois, il sera Amazing notre tisseur.